Tarun Tejpal - Son magnifique roman " loin de Chandigarh", publié il y a 3ans, l'a fait connaître en France.
Son nouveau roman : " Histoire de mes Assassins " (édit. Buchet-Chastel) est un manifeste contre les injustices, les
abus de pouvoir et la corruption.
Et Tarun Tejpal sait de quoi il parle !
46 ans, journaliste d'investigation, il crée le journal en ligne : Tehelka.
Surveillé, persécuté, menacé, jeté en prison....
Dès sa libération, il parcourt le pays de meeting en meetings pour lever des capitaux, convaincre les plus riches de
défendre les plus pauvres au nom de la Démocratie.
Il est protégé à son domicile par des gardes du corps. Il dit:
"Nous dépendons encore de nos financiers. je leur répète tous les jours : "Je ne travaille pas pour vous, mais pour les oubliés de ce pays. C'est pour celà que vous devez me soutenir. Pour que les médias et les politiques représentent les
pauvres." Je ne sais pas si nous tiendrons. Aujourd'hui, la tendance générale de la presse, en Inde comme en Occident,
consiste à parler des riches et des célèbres, des people, des puissants, à les faire mousser.
Partout la presse d'investigation, la presse qui dérange les consensus, est menacée. Nous avons le projet de créer une chaîne de télévision d'investigation, mais nous n'avons pas d'argent.
Il dit encore : "J'ai très peu de temps, 95% de mon temps est pris par Tehelka, le magazine d'information dont je suis le rédacteur en chef. C'est le genre de magazine qui est toujours au coeur des batailles les plus sombres contre le pouvoir et l'argent. Ce qui me laisse très peu de temps pour l'écriture. L'essentiel de ma vie est donc pris par le journalisme et il me faut dès lors débusquer du temps pour écrire.
La chose la plus intelligente que j'ai jamais fait fut de comprendre il y a 7 ans que je ne jouirais jamais de ce confort qu'est avoir assez de temps pour écrire.
Que je n'aurai jamais un bureau dont la fenêtre donnerait sur un arbre et que je pourrai m'y attabler et écrire en écoutant
le chant des oiseaux. J'ai compris que si je voulais écrire, ce serait à pas de course, en capturant l'instant ou que ce soit.
C'est de cette manière que j'ai écrit mon premier roman : "Loin de Chandigarh" (The alchemy of love) et celui-ci de même.
L'écriture a eu lieu dans des avions, des salons et des chambres d'hôtel, le matin, tôt avant d'aller au travail, tard le soir après le dîner, lors de voyages en voiture, à n'importe quelle occasion ou j'ai pu voler un peu de mon temps.
Car ce luxe d'une pièce à part, avec vue sur les arbres n'est pas le mien."
Il ajoute : " La presse travaille à grands traits, elle simplifie, elle décrit vite, elle réagit à l'évènement. La littérature montre le terreau qui voit naître l'actualité, elle peut entrer dans la psyché d'un meurtrier. Elle rend l'existence de chacun plus riche, plus émotionnelle, plus compliquée. La littérature arrive à montrer qu'un assassin est aussi une victime, que le pire d'entre eux a été innocent un jour. Qu'un oublié d'une caste pauvre possède une personnalité, une subjectivité aussi
complexe qu'un homme de pouvoir, que les deux sont à égalité en terme d'humanité. (à suivre)
Tarun Tejpal - suite et fin.